Velociraptor contre Protoceratops et Tarchia
Jurassic Park a donné une image du Velociraptor qui n’est pas tout à fait réaliste. Les paléontologues ont voulu savoir qui était vraiment Velociraptor, quelles étaient ses proies et comment il les tuait.
En mars 2003, le National Geographic avait publié un excellent article sur cette nouvelle génération de chercheurs qui utilisent les techniques modernes pour mieux comprendre le comportement et les capacités des dinosaures.
En 2005, la BBC a diffusé un documentaire qui retrace les dernières recherches s’appuyant sur la biomécanique pour recréer le portrait le plus réaliste possible de deux grands prédateurs du Crétacé : le Tyrannosaurus Rex et le Velociraptor.
Dans ce deuxième dossier, je vous invite à découvrir les découvertes effectuées sur le Velociraptor et sur les conséquences de son éventuelle rencontre avec un Protoceratops et un Ankylosaure de Mongolie, Tarchia.
Qui était vraiment Velociraptor ?
Depuis que Jurassic Park a mis en vedette un Velociraptor d’1,80 m de haut qui déchiquète sa proie grâce à sa redoutable griffe, ce dinosaure a une effroyable réputation de tueur.
Cette réputation est-elle fondée ?
Tout d’abord, la taille réelle du Velociraptor pose un problème. En effet, les paléontologues disposent de peu de fossiles complets, une dizaine, qui présentent de grandes différences de taille.
La plupart font moins d’un mètre de haut sauf un beau spécimen d’1,80 m. Ils sont pourtant tous adultes. Donc, soit le spécimen de grande taille est une exception, soit les Velociraptors, comme les êtres humains, pouvaient avoir une taille très variable.
On peut également envisager qu’il y avait un dimorphisme sexuel important chez cette espèce.
Il faudrait beaucoup plus de fossiles pour établir une taille standard et pouvoir différencier les mâles des femelles.
Squelette de Velociraptor. © dinosoria.com
Dans les documentaires et les films, le Velociraptor présente une peau semblable à celle d’un reptile.
Depuis septembre 2007, on a la preuve formelle que ce n’était pas le cas et que ce Dromaeosauridé était couvert de plumes.
En fait, cette supposition avait déjà été faite en 1986. avec la découverte du fossile d’un petit Dromaeosauridé très bien conservé.
En l’étudiant de près, on peut observer qu’une ligne noire lui parcourt le dos de la tête à la queue. Il était recouvert d’un duvet similaire à celui d’un oisillon.
En l’an 2000, des fermiers chinois ont mis au jour le fossile d’un Dromaeosaure avec des plumes beaucoup plus développées comme celles d’un oiseau adulte.
Dromaeosaure découvert en 2000. © dinosoria.com
En septembre 2007, des points de fixation de plumes ont été retrouvés le long des membres antérieurs d’un Velociraptor.
Grands ou petits, les Dromaeosauridés possédaient donc tous des plumes.
On peut imaginer que ces plumes étaient colorées comme le sont celles des oiseaux actuels.
Velociraptor ressemblait donc beaucoup à un oiseau. Bien sûr, il ne volait pas.
On sait également que Velociraptor chassait en bandes. Ce sont quatre fossiles de Velociraptors enterrés près de leur victime qui en ont apporté la première preuve dans les années 1960.
Ce dinosaure possédait une très longue queue. C’est un avantage pour un prédateur. Par exemple, le guépard s’en sert de contrepoids quand il poursuit sa proie. Il est fort probable que le Velociraptor s’en servait de la même manière pour changer rapidement de direction en pleine course.
D’après les tests effectués, le Velociraptor pouvait atteindre une vitesse proche de 40 km/h. Cette estimation se base sur un comparatif avec l’autruche, l’émeu et l’Homme, tous trois bipèdes.
Enfin, ses dents étaient bien celles d’un carnivore. Elles devaient être d’une efficacité remarquable car elles étaient recourbées et taillées en dents de scie. C’est idéal pour arracher des morceaux de chair.
Les griffes du Velociraptor
Velociraptor possédait trois doigts griffus aux membres postérieurs et antérieurs. Son arme la plus redoutable était la griffe en forme de faux terminant le deuxième orteil de chaque pied.
On peut donc imaginer qu’il éventrait ses proies.
Pour le savoir, les spécialistes en effets spéciaux ont construit une patte grandeur nature d’un Velociraptor en respectant les indications des paléontologues.
Ces derniers ont d’abord calculé la puissance de la patte de l’animal. En étudiant les fossiles, ils ont pu comprendre, à partir des os, comment étaient faits les muscles et donc quelle était la force du Velociraptor.
Il est à préciser que cette expérience a été menée en se basant sur un spécimen de moins d’un mètre.
Griffe biomécanique du Velociraptor
La patte d’un Velociraptor de moins d’un mètre avait la même puissance que celle d’un bras humain.
Ca peut sembler faible mais si on y ajoute le poids de l’animal bondissant sur sa proie, c’est alors une grande puissance qui passait par une petite griffe.
Pour reproduire la puissance de frappe, les techniciens ont utilisé un piston hydraulique. La réplique exacte de la griffe a été moulée dans de la résine.
La patte a d’abord été testée sur une peau de chamois qui a la même résistance que la peau humaine.
La griffe l’a déchirée sans problème.
Griffes fossiles de Velociraptor. © dinosoria.com
Puis, on l’a testé sur une panse de porc qui est beaucoup plus résistante. La griffe s’est montrée suffisamment aiguisée pour transpercer la chair mais elle ne l’a pas déchiqueté car sa face interne est arrondie et lisse.
Le Velociraptor n’éventrait donc pas ses proies. Il est plus juste de dire qu’il les poignardait.
Les célèbres fossiles d’un Velociraptor enlacé avec un Protoceratops, découverts en Mongolie, nous montrent comment le Velociraptor attaquait ses proies.
Velociraptor et Protoceratops. © dinosoria.com
Il ne poignardait pas sa proie au hasard mais visait une partie vitale du corps : le cou. Il avait ainsi de bonnes chances de transpercer la trachée ou la veine jugulaire pour provoquer une hémorragie.
La victime mourrait asphyxiée en quelques minutes.
Reconstitution du combat
Protoceratops était l’herbivore le plus répandu en Mongolie au Crétacé. C’était une proie assez facile pour le Velociraptor car son corps n’était pas protégé par une cuirasse. Il ne possédait pas de cornes.
Velociraptor contre Tarchia
A l’époque où vivait le Velociraptor, la plus grosse proie en Mongolie était un Ankylosaure du nom de Tarchia gigantea. Herbivore paisible et lent, ce dinosaure possédait une cuirasse et une étrange queue en forme de massue.
Il mesurait 8 à 9 m de long pour un poids estimé à 4,5 tonnes environ.
C’est une espèce très similaire à Ankylosaurus magniventris qui vivait à la même époque en Amérique du Nord.
Que se passait-il quand une bande de Velociraptors se retrouvait face à un Tarchia ?
Reconstitution d'une attaque d'un Velociraptor contre un Tarchia. By Corwinok
La queue de ce dinosaure était constituée de deux parties :
- La partie mobile et flexible
- La massue
Sur l’un des fossiles, on observe qu’il y a un impact de choc des deux côtés de la massue ce qui implique que cet Ankylosaure balançait bien sa queue comme une arme.
L’impact a été si brutal qu’un morceau d’os s’est brisé.
Impact du choc sur la queue
Pour savoir si cette queue était une arme vraiment redoutable, nos spécialistes des effets spéciaux, sous la direction de Kenneth Carpenter conservateur du Museum de Denver et spécialiste des Ankylosauridés, ont construit une queue en aluminium biomécanique grandeur nature.
L’aluminium a la même densité et la même résistance que la queue de ce dinosaure.
Queue biomécanique d'un Tarchia
C’est du volume musculaire de la queue que Ken Carpenter a pu déduire sa puissance maximale : 380 kg par cm²
C’est comme si un jeune éléphant s’asseyait sur un ongle.
Le premier test a été effectué sur une carcasse de porc. La queue a traversé la carcasse en brisant les côtes.
L’autre grand prédateur de Mongolie, à cette époque, était le Tarbosaurus, un cousin asiatique du Tyrannosaurus Rex.
Tarbosaurus bataar . © dinosoria.com
Les techniciens ont voulu tester la queue du Tarchia sur une poutre ayant la même taille et la même résistance qu’une patte de Tarbosaurus.
La poutre a été fracassée en un seul coup. Donc, même un Tarbosaurus devait grandement se méfier de cet herbivore.
Tarbosaurus contre Tarchia
Un Velociraptor aurait été tué sur le coup. Cependant, il était très agile. Il aurait donc pu éviter cette massue et s’approcher suffisamment pour percer à un endroit vital la cuirasse de Tarchia.
Mais le pouvait-il vraiment ?
Comparatif Tarchia et Velociraptor
Actuellement, c’est le crocodile qui possède la cuirasse la plus résistante. Une nouvelle expérience a donc été faite avec la griffe biomécanique mais cette fois sur une peau de crocodile issue d’un élevage australien.
La griffe a rebondi sur la peau en l’égratignant à peine et le bout de la griffe s’est brisé. Le Tarchia était donc un véritable char d’assaut au même titre d’ailleurs qu’Ankylosaurus.
Le Velociraptor n’avait aucune chance face à cet adversaire.
Seulement voilà, notre Velociraptor n’a pas dit son dernier mot. En effet, tous les crocodiles possèdent une cuirasse sauf les juvéniles. Ces derniers sont donc beaucoup plus vulnérables. Un héron, par exemple, peut percer leur peau alors qu’il se casserait le bec sur un adulte.
Les paléontologues ont donc supposé que les petits Ankylosaures devaient être également vulnérables. Ils avaient raison. En Mongolie, on a découvert les fossiles de 12 petits Ankylosaures.
Parmi leurs ossements, il y avait les crocs de leur prédateur : le Velociraptor.
Dents d'un Velociraptor. © dinosoria.com
On peut donc en conclure que les Velociraptors chassaient en bande en mettant en œuvre un plan d’attaque.
Intelligents comme le prouve le moulage de leur cerveau, ils faisaient diversion pour éloigner les adultes et isoler les plus jeunes.
Même si le Velociraptor ne ressemblait pas à l’image que le cinéma en a donnée, il était quand même un féroce prédateur et une vraie machine à tuer.
V.Battaglia (16.02.2008)
Références principales et Crédit photographique
Documentaire de la BBC . The Thruth about killer dinosaurs
Dinosaures. Editions Nathan 2001
Les Dinosaures. Editions Contmedia 2006
Les photos, sauf autres mentions, sont des captures d'écran du documentaire de la BBC "The Thruth about killer dinosaurs"