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Le Cambodge des Khmers Rouges

Quand à Noël 1978, les Vietnamiens envahissent le Cambodge, ils découvrent un spectacle hallucinant. Aucun mot ne pourra jamais relater le cauchemar que les Khmers Rouges ont fait subir aux Cambodgiens.
C’est un peuple entier qui a été condamné à mort par ses dirigeants entre 1975 et 1979.

Les Khmers Rouges

En 1954, à la fin de la guerre d’Indochine, alors que la plupart des militants communistes se réfugiaient au Viêt Nam du Nord, un certain nombre d’entre eux décident de résister au régime du Prince Sihanouk.

La plupart des chefs de ces partisans ont fait leurs études à Paris. Par exemple, l’un des principaux dirigeants de la résistance, Khieu Samphan, a soutenu en France sa thèse dans laquelle il prônait un développement autarcique du Cambodge, fondé sur l’agriculture. Il écrivait que les citadins n’étaient que des parasites qu’il fallait affecter aux champs et aux usines.
L’histoire ne dit pas si il a obtenu son diplôme grâce à cette brillante théorie.

Les opposants au régime officiel constituent, à partir de 1963, des maquis autour d’un chef, Saloth Sar, dit « Pol Pot ».
Six ans plus tard, des paysans chassés par les bombardements américains sur les régions tenues par les opposants viennent grossir leurs rangs.

Victimes du génocide des Khmers Rouges

Victimes du génocide des Khmers Rouges. (Musée du génocide des Khmers rouges). By tkelly7029 . Licence

A partir de 1970, le prince Sihanouk est renversé par un coup d’état proaméricain du maréchal Lon Nol.
Ce dernier réclamera en 1975 lors du siège de la capitale par les Khmers une aide financière aux américains pour tenir tête aux opposants. Cette aide de 222 millions de dollars sera refusée par le Congrès américain.


Exilé en Chine, le prince Sihanouk apporte sa caution à ses anciens ennemis, les Khmers.

Malgré tout, les Khmers rouges éliminent dans les régions qu’ils contrôlent les partisans du prince puis les exilés revenus du Viêt Nam, pourtant également communistes.

L’Angkar

Le noyau militaire du mouvement, l’Angkar qui signifie « L’Organisation », exige une discipline aveugle. Sa réputation de cruauté se répand très rapidement.
Les Khmers rouges prennent le pouvoir au Cambodge en avril 1975, dans un pays dévasté par la guerre civile.
Ce pays a reçu en trois ans trois fois plus de bombes américaines que le Japon pendant la Seconde guerre mondiale.

Pol Pot dirige le gouvernement. Dès lors les frontières se ferment et une expérience démentielle commence.

Salle de torture. Genocide des Khmers Rouges

Salle de torture à Tuol Sleng. By tkelly7029 . Licence

Immédiatement, toutes les villes doivent être évacuées. Un missionnaire français rapporte ces propos d’un commissaire politique :

« Il faut que les gens apprennent qu’ils naissent du grain de riz. En suant pour défricher, pour semer, planter, récolter, l’homme connaît la vraie valeur des choses. La ville est mauvaise, non pas les gens : car les gens sont réformables, mais pas la ville ; c’est en ville qu’on trouve l’argent et la corruption ».

Sur cette base incroyable, tous les signes d’une société dite décadente sont abandonnés : vêtements de couleur, machines à écrire, électrophones, radios, automobiles, télévisions, écoles, postes, eau courante et jusqu’aux hôpitaux et aux marchés.

Retour à la préhistoire

Le pays est ramené à l’époque du Néolithique. Toute la population est employée à la riziculture et à des travaux d’irrigation épuisants.

Dès l’âge de huit ans, les enfants travaillent 10 heures par jour pour un bol de soupe et deux bols de riz par jour.

Les organismes épuisés et sous-alimentés ne résistent pas à la maladie. La malaria fait rage et aucun médicament ne doit être demandé à l’étranger.

La vie privée n’existe plus et les familles sont séparées.

Témoignage d’un rescapé des camps :

Depuis le jour où il a quitté Phnom Penh jusqu'à son passage en Thaïlande, l'histoire de Pin Yatay et des siens est une suite de déplacements, de labeur forcé, de privations et de drames. Ils vont d'un " karatan " (chantier de travail) à l'autre, dans un pays qui en est couvert, selon Radio-Phnom-Penh. Homme de bureau, Pin Yatay s'initie aux travaux de la terre dans le village de Koh-Tom, au sud de la capitale. C'est un village du " peuple ancien " qu'il convient donc de " purifier " de ses " souillures impérialistes ", " capitalistes ", " coloniales " et " féodales ". " C'est un peuple inférieur, nous étions tout juste des bêtes de somme ".
« Chaque famille se construit une paillote de fortune que les pluies de la mousson transpercent de juin à octobre. Le taux de mortalité est élevé. Entre cinq et dix personnes par jour. »

Une extermination organisée

En dehors des dirigeants, ceux qui ont été en contact avec l’Occident sont éliminés. Porter des lunettes c’est-à-dire avoir l’air d’un intellectuel est synonyme de condamnation à mort immédiate.

Pour survivre, les enfants doivent dire qu’ils étaient trop pauvres pour aller à l’école. L’Angkar a le droit de vie et de mort sur chacun.

Par souci d’économie, les exécutions se font à coup de manche de pioche ou par étouffement dans un sac en plastique. Le régime créé une milice constitué de jeunes paysans, des enfants qui n’ont rien connu d’autre que la guerre et la torture.
Endoctrinés, ces enfants doivent être, selon le régime, les seuls survivants.

Victimes du génocide des Khmers Rouges

Victimes du génocide des Khmers Rouges. By Adam Carr . Licence

Selon Pol Pot, « il suffit de 1 à 2 millions de jeunes Khmers rouges pour faire le Cambodge de demain ».
Exécutions sommaires et goût des spectacles sanguinaires, la torture est devenu un véritable sport national.

Le Cambodge ne fait que le tiers de la France. Avant l’arrivée des Khmers, la population était d’environ 9 millions d’habitants, à 90% Khmers.
Entre 1975 et 1978, plus de 300 000 personnes ont été exécutées de manière individuelle ou collective et 2 à 3 millions de personnes sont mortes de maladie, de privation ou des sévices.

Le Cambodge libéré

Les Vietnamiens prennent Phnom Penh, la capitale, le 7 janvier 1979. Pol Pot s’enfuit à l’étranger devant l’avancée des troupes en avril. Il sera condamné à mort par contumace pour génocide en août 1979.
La sentence ne sera jamais exécutée. Il meurt de sa belle mort au Cambodge en mai 1998 après s’être retranché dans un des derniers maquis Khmers rouges.

Le cauchemar n’est pas fini. La famine règne dans le pays. La Croix-rouge met en place un vaste programme d’aide pour sauver plus de 2 millions de personnes dans une situation critique.
Le Viêt Nam n’a retiré ses troupes du Cambodge qu’en 1990. L’aide tardive des Etats-Unis permet un léger espoir.
Cependant, il faudra plusieurs générations pour que les horreurs de ces 4 ans s’estompent dans la mémoire de la population.
Le Cambodge reste l’un des pays le plus pauvre au monde. Mines et bombes, souvenirs de tant de combats, continuent à mutiler et à tuer.

V.Battaglia (04.2005)

Références

The Pol Pot Regime: Race, Power, and Genocide in Cambodia under the Khmer Rouge, 1975-79. Professor Ben Kiernan and Ben Kiernan. 2002
When The War Was Over: Cambodia And The Khmer Rouge Revolution. Elizabeth Becker. 1998

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