Traitement des excréments au Moyen Âge Insalubrité et épidémies Le Moyen Âge est sans conteste l’âge d’or de la saleté. Dans les villes, on rejette directement les excréments dans les rues. La population jette les déjections par les fenêtres et les matières fécales viennent s’amonceler sur les chaussées avec les autres immondices dont ceux des nombreux animaux qui se promènent en liberté. |
Tant que l’homme a vécu une vie nomade, le problème de la gestion des excréments ne s’est pas posé. Bien que posant un gros problème, les excréments ont rapidement servi de combustible, notamment pour cuire le pain. On peut affirmer que les civilisations de l’Antiquité (Egypte, Grèce et Empire romain) se sont montrées très pointilleuses quant à l’hygiène et la propreté des villes. Egouts, latrines publiques ou privées, étaient largement répandus. Les scientifiques de la Grèce antique avaient compris que l’infection de l’air ou de l’eau pouvait apporter des maladies. Par contre, au Moyen Âge, on constate une coupure totale avec les bonnes habitudes de l’Antiquité. Dès la chute de l’Empire romain, les égouts et les latrines tombent en désuétude. L’Europe est alors morcelée en petits Etats qui ne possèdent pas de réel pouvoir central. Les latrines restent d’actualité dans la plupart des monastères et des couvents. Il s’agit d’une pièce où des sièges, sedilia, sont accolés le long d’un mur. Dans les châteaux féodaux, des latrines ou des fosses d’aisance sont creusées dans les murs. Les excréments tombent dans le fossé intérieur ou extérieur selon l’aménagement. Le siège consiste en une dalle trouée.
La gestion des excréments et autres immondices semble avoir été un problème crucial et complexe durant tout le Moyen Âge. Plusieurs systèmes ont été utilisés :
Tous ces systèmes se sont montrés inopérants et très polluants. Paris est un excellent exemple de ce qui se pratique au Moyen Âge. Le Paris moyenâgeux est une cité aux rues étroites et non pavées. Là-dessus, s’ajoutent les cochons, les oies ou les chiens qui pataugent avec allégresse et défèquent partout. C’est Philippe Auguste, en 1184 environ, qui a ordonné que les rues soient pavées. Malgré plusieurs règlementations et la menace de sanctions, la population parisienne continue du XIIe au XVIe siècle à utiliser la rue comme dépotoir. Si les rues des villes sont restées si longtemps insalubres, c’est avant tout à cause d’un problème financier. On estime qu’au XIVe siècle, à Paris, ce sont 40 tonnes de déchets (déjections fécales comprises), 200 000 litres d’urine et les excréments de milliers d’animaux qui, chaque jour, sont déversés dans les rues.
Les hôpitaux du Moyen Âge ressemblent beaucoup à l’enfer de Dante. Il s’agit d’ailleurs avant tout de lieux où l’on meurt et non où l’on guérit. Les animaux, notamment les chiens, se baladent au milieu des « patients », urinant en cœur. Les malades se transmettent toutes les maladies possibles et peu d’entre eux sortent de ces mouroirs, du moins sur leurs deux jambes. Il faudra attendre le XIXe siècle pour que les premières règles d’hygiène soient instaurées dans les hôpitaux. Dans les écoles, le problème est identique. Du XVIe au début du XXe siècle, l’hygiène sanitaire est déplorable dans les établissements scolaires. En France, il a fallu attendre 1970 pour qu’un plan de rénovation des toilettes scolaires soit mis en place.
Toutes les grandes épidémies qui se sont déclarées en Europe entre le XIIe et le XIXe siècle sont liées à l’insalubrité et le manque d’hygiène. Entre 1347 et 1400 environ, toute l’Europe est touchée par la peste. Les épidémies de peste Noire qui frappent de manière cyclique poussent les autorités à se préoccuper de l’hygiène. On fait nettoyer les rues, on brûle les maisons des pestiférés, on éloigne les dépôts d’ordures des villes et on interdit la divagation des animaux. En 1348, la peste a fait 80 000 morts à Paris. Malheureusement, ce sursaut d’hygiène n’a pas perduré au-delà de la tragédie. Dès que les épidémies ont pris fin, chacun a repris ses mauvaises habitudes. Les mouches, les rats et les puces ont été les principaux vecteurs des maladies. Entre le XVe et le XVIIe siècle, les épidémies de typhus ont fait des ravages en Europe. Le typhus exanthématique est la maladie de la saleté, de la promiscuité et de la misère. Toutes les guerres, y compris contemporaines, ont été accompagnées d’épidémies de typhus. Au 20e siècle, une épidémie de typhus s'est propagée au Burundi entre 1996 et 1998. Loin d’avoir été éradiquée, cette maladie peut réapparaître n’importe où pourvu que les conditions s’y prêtent. Le choléra est la maladie propre au manque d’hygiène. La bactérie, vibrio cholerae, prospère dans l’eau, transite par les mains et les aliments puis pénètre dans l’organisme. Aujourd’hui encore, partout dans le monde où de grandes concentrations urbaines connaissent la pauvreté, la promiscuité et un manque de salubrité, le choléra frappe. En 1991, il y a eu une flambée de choléra au Pérou. Au Rwanda, en 1994, il y a eu 48 000 cas de choléra, dont 23 800 mortels. V. Battaglia (26.09.2008) Papier-toilette (Usages de l'Antiquité à nos jours) . La Peste Noire en Occident Références et liens externes Pandémies et conséquences du choléra sur le site de l'OMS Martin Monestier, Histoire et bizarreries sociales des excréments. Le Cherche Midi 1997 |