Bhopal
Le 3 décembre 1984, une
fuite de gaz toxique provenant d’une usine
américaine décime la population
de la ville de Bhopal, en Inde. |
Le 3 décembre 1984, vers 2 heures du matin, une fuite se produit au niveau de la cuve 610 de l’usine américaine de pesticides Union Carbide, située près de Bhopal, la capitale du Madhya Pradesh, un des états les plus pauvres de l’Inde. Un nuage s’élève, chargé d’isocyanate de méthyle, un produit particulièrement toxique. Très rapidement, il atteint un bidonville proche de l’usine. L'usine de pesticides Union Carbide ( © Sinh-Sipa Press) Les cabanes de boue, de briques ou de toile sont une protection
dérisoire contre les émanations. Quelques instants plus tard, le nuage est sur la gare. Alors qu’il tente de prévenir les trains qui se dirigent vers Bhopal, le chef de la station meurt, le téléphone à la main. Le nuage toxique s'étend bientôt sur près de 25 km². Le lendemain, 4 décembre, la ville présente un spectacle sinistre : des morts partout dans les rues, dans les maisons et sur les rails du chemin de fer. Des hommes, des femmes, des enfants et aussi de nombreux animaux qu'il faut ramasser au plus vite.
Dans les jours qui suivent, les survivants doivent évacuer
les cadavres pour éviter une épidémie. De nombreux hindouistes préfèrent porter directement leurs proches sur les sites de crémation. Mais, il y a tant de corps à brûler que bientôt le bois vient à manquer. © Sinh-Sipa Press De nombreux survivants sont dans le coma ou sont devenus aveugles. Les médecins démunis ne disposent pas des médicaments nécessaires. Des milliers d’habitants fuient l’usine maudite et se jettent sur les routes. Six jours après le drame, on comptabilise 2 500 morts, de nombreux orphelins et des milliers de malades en traitement. C’est le bilan le plus lourd jamais enregistré pour ce type d’accident.
Beaucoup de malades meurent au cours des semaines qui suivent l’accident. Les tissus pulmonaires atteints, la moindre infection, une grippe, un rhume, est fatale. Le nuage empoisonné s’est dissipé mais il continue à tuer. Les victimes meurent après avoir connu l’angoisse d’être aveugles ou la souffrance d’étouffer. © Sinh-Sipa Press On pleure les proches disparus mais aussi les animaux. Pour cette population qui vit en dessous du minimum de pauvreté, un buffle est une véritable richesse. Le bilan médical, dans les quelques années qui suivent, est éloquent : 500 000 malades atteints d’affections des voies respiratoires, de tuberculose, de diminution de l’acuité visuelle, de problèmes gynécologiques, de troubles du comportement …. © Sinh-Sipa Press On meurt beaucoup à Bhopal dans les années qui suivent la tragédie.
Dès le lendemain de la catastrophe, une enquête a été ouverte. Au tribunal de Bhopal, 522 355 plaignants réclament trois milliards de dollars à l’entreprise responsable, qui plaide non coupable. En effet, la compagnie américaine reproche aux autorités indiennes et aux autorités locales de ne pas avoir lutté contre le « développement urbain sauvage autour de l’usine ». De plus, elle soutient qu’un sabotage est à l’origine de l’accident. © Sinh-Sipa Press L'usine avait déjà connu trois accidents depuis son installation en 1977, qui, en faisant quelques victimes, étaient autant de sonnettes d'alarme. Le 14 février 1989, la Cour suprême indienne condamne Union Carbide à payer 470 millions de dollars aux victimes de la tragédie. Les multinationales ont dû se sentir rassurées après le jugement quant aux responsabilités civiles ou pénales qu’elles encourent pour leurs activités dans le tiers-monde.
Devant le portail de l’usine, à Bhopal, une statue
a été élevée quelques mois après
la catastrophe. Le tiers-monde n’est pas une poubelle où les pays Occidentaux peuvent impunément déverser leurs déchets dans le mépris total de la sécurité des habitants et sans le moindre respect pour l’environnement. © Sinh-Sipa Press Plusieurs associations avaient demandé le déplacement
de cette usine, construite à moins de 10 km, d’un centre
urbain d’un demi-million d’habitants. Union Carbide a reconnu ne pas avoir installé dans son usine
un système informatisé d’alerte à la
fuite de gaz. V.B (27.03.2006) Bibliographie principale La Mémoire de l’Humanité « Les grandes tragédies », éditions Larousse < Histoire |